L’ENFANT AU CŒUR DE LA PROCEDURE JUDICIAIRE

Maitre Marie-Christine Klepping

  • Avocate au barreau de Dijon
  • Chargée de cours à l’Université Paris-Descartes
Art 1er de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant : « un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte  plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ».

 

La place de l’enfant dans les procédures évolue en fonction de la matière et du juge concerné (juge des enfants, juge aux affaires familiales, juge pénal, juge des tutelles…).

Son rôle évolue également en fonction de son discernement.

I) L’ENFANT DANS LES PROCEDURES CIVILES

A) Devant le juge des enfants

L’article 375 du Code civil dispose : « si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l’un d’eux, de la personne ou du service à qui l’enfant a été confié ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public. »

L’enfant est partie à la procédure ce qui signifie qu’il peut présenter une requête, assister à l’audience et présenter des observations avec l’aide de son avocat et faire appel.

B) Devant le juge aux affaires familiales

Articles 373-2-6 et suivants du Code Civil : le juge aux affaires familiales est saisi par les parents ou le Ministère Public.

L’enfant ne peut pas saisir le JAF : il n’est pas partie à la procédure.

Il peut être entendu à titre de simple information (article 388-1 du Code Civil) mais il peut demander à être entendu. Cette audition est de droit si l’enfant en fait la demande. Si le juge refuse, il doit motiver ce refus.

Lorsqu’il est entendu, le mineur peut être seul ou accompagné d’un avocat ou d’une personne de son choix.

Le juge doit s’assurer que l’enfant a eu connaissance de sa possibilité d’être entendu (impossible à mettre réellement en œuvre en pratique).

C) Devant le juge des tutelles

Un enfant mineur est placé sous le régime de la tutelle :

  • si ses 2 parents sont décédés,
  • ou s’ils font l’objet tous les deux d’un retrait de l’autorité parentale,
  • ou si l’enfant n’a ni père, ni mère.

Possibilité de mettre en place une tutelle à la personne et une tutelle aux biens exercées par des personnes différentes.

Il peut être assisté d’un avocat.

Dans le cadre de la tutelle : à sa demande et s’il est capable de discernement, sauf avis contraire motivé du juge, le mineur peut obtenir une réunion du conseil de famille (par exemple, pour lui exprimer son avis sur des décisions qui le concernent).

Il peut assister aux réunions du conseil à titre consultatif, sauf si le juge estime sa présence contraire à son intérêt.

A partir de 16 ans, sur simple demande, le mineur peut obtenir une réunion du conseil de famille.

Une fois devenu majeur, il a 5 ans pour agir en contestation. Cette action est possible s’il juge les organes de la tutelles (tuteur, juge des tutelles, greffier…) responsables du dommage résultant d’une faute quelconque commise dans l’exercice de leur fonction.

II) L’ENFANT DANS LA PROCEDURE PENALE

A) L’enfant Victime

     1- Saisine de la justice :


  • Information préoccupante
  • Signalement
  • Dépôt de plainte

     2- Dépôt de plainte :

Un mineur victime d’une infraction peut porter plainte lui-même en écrivant au Procureur ou en se rendant (seul ou accompagné) dans les locaux de la police ou de la gendarmerie.

Le mineur peut ainsi signaler toute infraction dont il est victime à la justice. Pour que ses droits soient exercées dans le reste de la procédure (enquête, instruction, jugement, recouvrement dommages et intérêts…), il devra obligatoirement être représenté :

  • soit par ses représentants légaux,
  • soit par un administrateur ad hoc désigné par le juge saisi du dossier ou le 
Parquet, lorsque les parents du mineur ne peuvent pas défendre ses intérêts. C’est notamment le cas si les parents sont impliqués dans l’infraction (ex : maltraitance) ou lorsqu’ils ont été défaillants (n’ont pas déposé plainte alors qu’ils avaient connaissance des faits, ne se sont pas constitués suite à un avis à victime…). 
L’ordonnance de désignation de l’administrateur ad hoc peut faire l’objet d’un appel par les parents dans les 15 jours de la désignation.

     3- Audition des mineurs via le protocole du NICHD : 


Art 706-52 CPP prévoit l’enregistrement audiovisuel obligatoire des mineurs victimes pour toutes les infractions énoncées dans l’article 706-47 du Code de Procédure Pénale (meurtre, torture, acte de barbarie, violences avec infirmité permanente, viol, agressions sexuelles, corruption de mineur, atteintes sexuelles…).

Pour toutes les autres procédures, il est fortement conseillé.

B) L’enfant auteur

     1- Garde à vue : possible uniquement à partir de 13 ans.


Dès le début de la garde à vue, le mineur doit être assisté par un avocat. Le mineur doit être informé des faits qui lui sont reprochés et de ses droits.

Toutes les informations qui lui sont destinées doivent également être communiquées aux titulaires de l’autorité parentale (sauf si c’est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant ou au bon déroulement de l’enquête).

     2- Interrogatoires


Tout interrogatoire de mineur fait l’objet d’un enregistrement audiovisuel.

     3- Juridictions de jugement


Juridictions spécialisées pour les mineurs, en fonction de l’infraction :

 En France, la majorité pénale est fixée à 18 ans, âge en deçà duquel les mineurs :

  • sont jugés par des juridictions spécialisées (TE ou Cour d’Assises des Mineurs)
  • bénéficient par principe de l’excuse de minorité.

Cette règle établie par l’article 20-2 de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, dispose que la peine d’emprisonnement ou d’amende encourue par un mineur ne peut être supérieure à la moitié de la peine encourue par les majeurs. Elle ne peut être écartée que pour les mineurs de plus de 16 ans, à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l’espèce et de la personnalité du mineur ainsi que de sa situation.

4- Mesures ou sanctions possibles en fonction de l’âge


Ainsi les réponses pénales qui peuvent être apportées, varient en fonction de l’âge 
du mineur au moment de la commission des faits :

  • Avant 10 ans : uniquement des mesures éducatives
  • Entre 10 ans révolus et 13 ans : des mesures éducatives ou des sanctions 
éducatives
  • Entre 13 ans révolus et 18 ans : des mesures éducatives, ou des sanctions 
éducatives, des peines ou des mesures éducatives cumulativement à des peines.

III) L’ENFANT EN DROIT DU TRAVAIL

Avant 14 ans, un mineur peut travailler uniquement dans des secteurs d’activités très précis (tels que le cinéma, le mannequinat, le monde du spectacle…). Le représentant légal du mineur doit effectuer une demande d’autorisation administrative auprès de l’inspection du travail.

A partir de 14 ans, un enfant peut travailler pendant les périodes vacances scolaires.

A partir de 15 ans, un enfant peut travailler soit pendant les périodes de vacances scolaires, soit dans le cadre d’un contrat d’apprentissage : contrat qui peut être établi entre l’employeur, le mineur et ses parents et qui lui permet de travailler en alternance (il doit avoir terminé sa 3ème sinon il doit attendre d’avoir 16 ans).

Pour les autres types de contrat, l’employeur peut embaucher un mineur d’au moins 16 ans s’il a l’accord écrit de ses représentants légaux, sauf pour effectuer certains travaux interdits ou réglementés.

IV) LE COUT DE LA PROCEDURE POUR L’ENFANT

L’enfant a droit à l’aide juridictionnelle d’office si le litige l’oppose à ses parents : audition devant le juge aux affaires familiales (audition, demande de pensions alimentaire…) ou par le juge des tutelles dans une procédure qui le concerne.

L’aide juridictionnelle (paiement par l’Etat) permet de garantir l’indépendance du défenseur de l’enfant vis-à-vis des représentants légaux.

A- S’agissant des enfants victimes :

Droit à l’aide juridictionnelle sans condition de ressources : lorsque la personne a été victime d’un crime particulièrement grave comme un viol, des actes de torture et de barbarie, des violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou un handicap permanent sur mineur de moins de 15 ans ou personne vulnérable.

  • Viol : Aide juridictionnelle de droit 
Agression sexuelle : aide juridictionnelle sous condition de ressources des parents ;
  • Si un administrateur ad hoc est désigné : aide juridictionnelle

B- Pour les mineurs auteurs

Les ressources des parents ne sont pas prises en compte, si les parents du mineur manifestent un désintérêt à son égard à l’occasion d’un procès pénal qui le met en cause. Dans le cas contraire, le bénéfice de l’aide juridictionnelle dépendra des ressources des parents (sachant que ceux-ci sont civilement responsables de leur enfant mineur qui sont sous leur garde).

Les mineurs étrangers, ont également le droit à l’aide juridictionnelle sans condition de ressources.

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